Enregistré à Nantes le 13 septembre 2018
Bonjour, je suis Marie Pixel, issue de la génération Y, la première génération née en régime numérique. C’est vrai que de mon côté, j’ai vite laissé mon magnétophone et mes carnets papiers pour tout faire sur mon téléphone portable. Aux rencontres Numérique en Commun[s], on y a passé deux jours à échanger, et je dois dire que j’ai chargé et déchargé mon téléphone peut-être douze fois. J’y suis venue avec une appli de train, j’y ai logé avec une appli d’échanges de logements entre particuliers, et mes notes étaient toutes sur mon téléphone, sur un cloud, un nuage, un serveur.
Si vous n’avez rien compris à ce que j’ai dit, écoutez-nous. Si vous avez tout compris, écoutez-nous. Bref, Internet est né il y très peu de temps à l’échelle de l’histoire de l’histoire de l’humanité, et en très peu de temps, le monde a bien changé.
Le NEC+ c’est un retour sur l’histoire de la médiation numérique vue par ceux qui la font. Nous essayerons de comprendre ce que représente pour eux un numérique en commun, au pluriel comme au singulier.
Maïa Dereva est avant tout une tête pensante. C’est avec beaucoup de calme qu’elle s’est assise, et la simplicité de son approche m’a presque fait oublier qu’elle pouvait écrire des phrases comme « le respect du pair comme condition de la réciprocité » (pair p-a-i-r bien sûr). Quand j’entends ça, moi, j’ai l’impression qu’on a trouvé la solution à tous les problèmes de l’humanité. Mais bon, Maïa est plus lucide, et elle se décrit sur son site : « Ma vocation, c’est la documentation subjective de ma vie et de celle de mes contemporains« . Tout simplement. Penseuse, passeuse, elle documente. Elle est de celles et ceux qui semblent lire que le code source de notre société actuelle porte une faille irrationnelle. Alors, curieux, savants, fous, écrivains, elles et ils cherchent à décrire d’autres possibles.
Marie : Bonjour Maïa, c’est un plaisir de passer quelques minutes avec toi ici au Medialab de l’Ecole d’Architecture.
On prend quelques temps pour discuter un peu de nos identités numériques. Alors je suis une grande curieuse, je suis allée un peu fouiller, j’ai vu que tu avais une activité minimum sur les réseaux par rapport à l’envergure de ton travail, mais par ailleurs, un blog (ou une site) avec là tout d’un coup beaucoup de textes, une grande littérature, qui te décrit, de façon assez intime et personnelle.
Comment est-ce que tu décrirais ton trajet vers cette identité numérique, et qu’es-tu prête toi à laisser en ligne et à donner en ligne, et où ?
Maïa : ce site est le résultat d’une démarche qui a été longue. Pendant très longtemps j’ai cloisonné mes différentes identités sur internet, avec différents pseudonymes (à la fois mon identité réelle et des pseudos). Et donc en fonction des sujets sur lesquels j’avais envie de m’exprimer, je n’utilisais pas les mêmes canaux, et il n’y avait forcément pas les mêmes publics (à la fois dans des forums de diffusion, sur Facebook,…). J’avais beaucoup de pratiques différentes. Et puis le temps passant, cloisonner demande énormément d’énergie, et de toutes façons le monde est petit, et au final on finit par toujours rencontrer les mêmes personnes, quels que soient les milieux dans lesquels on évolue. Je me suis rendue compte que c’était vain de vouloir cloisonner comme ça, et ça a été presque une démarche intime, personnelle, d’assumer toutes les facettes, et de ne pas vouloir être un personnage ici ou là en fonction du contexte. Ca fait du bien ! Au début ce n’est pas facile à assumer parce que j’ai gravité dans des milieux totalement différents : la psychothérapie, la question des surdoués, plus récemment, depuis 3 ans, les communs : ce sont des thèmes qui, a priori, n’ont pas de rapport les uns avec les autres. Pour moi ils en ont un puisque c’est mon parcours, mon vécu, et je n’ai plus du tout envie de faire semblant d’être qui je ne suis pas.
Marie : aujourd’hui on a la sensation que tu portes une identité, en tous cas sur ce blog, qui est très homogène, assez unique, et qui est à ton nom puisque c’est un site à ton nom. Est-ce que c’est aussi affirmer une trans-disciplinarité, un poly-intérêt, une gourmandise sur les questions non seulement numériques mais aussi sociales, mais aussi de narration tout court puisqu’on a l’impression au début de rentrer sur une apporche plutôt de recherche et puis tout d’un coup on voit la rubrique « Fiction », et puis tout d’un coup on se rend compte que ta manière d’interpréter ta vie, c’est aussi rentrer par des endroits qui ne sont pas forcément d’une discipline, attachée à un secteur ?
Maïa : c’est exactement ça. Pour être plus précise, ce n’est pas mon nom, c’est un pseudonyme. C’est un choix que j’ai fait pour pouvoir exercer mon droit à l’oubli le jour où j’en aurai assez. Je peux pouvoir dire que tout ce qui est au nom de Maïa Dereva sur la toile est une époque, une histoire. Et si je veux pouvoir couler des jours heureux lors de ma retraite, il n’y aura pas de traces dans Google. Ceci dit, c’est une identité à part entière. Aujourd’hui, les gens m’appellent par ce nom, je suis invitée dans les événements avec ce nom là, et j’ai développé une espèce d’identité publique. C’est un pseudonyme comme en ont les écrivains. C’est une forme de protection que j’ai choisie.
Marie : finalement, pour te dévoiler entière, tu as quand même choisi de faire un pas de côté et d’avoir un pseudo ?
Maïa : Oui, tout à fait. Ca me permet justement, comme tu l’as très bien analysé, d’envisager ma propre vie comme un sujet d’étude, et d’en parler avec un peu de distance. Il faut quand même bien comprendre que quand je pose quelque chose d’intime sur ce site, c’est que pour moi c’est déjà émotionnellement digéré, et que je peux le partager sans prendre de gros risques.
Marie : je rebondis un peu parce qu’aux Numérique en Commun on discute effectivement de la notion de numérique et de commun, mais on a aussi beaucoup abordé la question de la dématérialisation des services publics dans lesquels tu n’utilises pas ce nom si j’ai bien compris…
Maïa : eh non, forcément !
Marie : …et tu y laisses une trace. Est-ce que c’est quelque chose qui aujourd’hui t’inquiète, te rassure, te donne envie, te semble être une solution politique ? A quel endroit tu situe cet action de l’état de dématérialisation ?
Maïa : je dirais que derrière l’outil, il y a toujours une idéologie. Donc la dématérialisation en soi n’est pas quelque chose de forcément mauvais si ça rend service. Par contre, qu’est-ce qu’on en fait après ? Et qu’est-ce qu’en feront les dirigeants de demain dont on ne sait rien ? Donc non, je ne suis pas forcément très à l’aise avec cette question, pas non plus du tout à l’aise avec l’idée de voter en ligne, parce qu’on a beau me dire que ce sera crypté, je sais qu’il y aura toujours un technicien pour savoir qui a voté quoi. Je suis assez prudente avec ces questions technologiques, d’une part. D’autre part, comme je l’ai évoqué ce matin dans la conférence, je suis assez sensibilisée à la question de l’effondrement, et je m’inquiète beaucoup de voir une société qui s’engage tête baissée dans la numérisation à outrance de tous les rapports qu’il peut y avoir entre les citoyens et les institutions, alors qu’il est fort probable qu’on ne puisse plus le faire dans un horizon qui n’est pas si éloigné que ça, et que donc ça va complètement déstructurer la façon dont on envisage les choses aujourd’hui. Se passer complètement du papier en s’imaginant qu’on aura toujours les ordinateurs, que c’est acquis, c’est aussi quelque chose qui me pose question, au-delà de ce qui a été évoqué ce matin à propos de l’égalité d’accès aux personnes, évidemment. Quand je vois que même moi je ne comprends rien au site de la CAF, je me pose forcément des questions pour des personnes qui auraient moins de bagages en études. Je trouve que ce n’est pas très humain ni très égalitaire.
Marie : je repasse un tout petit peu sur le papier, parce que c’est vrai qu’on parle de numérique ici plus tellement comme un outil technologique mais aussi comme une philosophie, et vers quelle philosophie on a envie d’accompagner le numérique demain. Est-ce que tu écris encore sur papier ?
Maïa : oui, ça m’arrive, notamment quand je suis dans le train par exemple. C’est irrépressible. J’ai toujours de toutes façons un carnet et un crayon, et ensuite quand je rentre à la maison, je recopie mes notes sur l’ordinateur. J’ai beaucoup de plaisir à écrire sur du papier. D’ailleurs ce n’est pas la même écriture. Il y a quelque chose de plus intime, de plus posé. Ce n’est pas tout à fait la même chose, ça passe par le geste.
Marie : je ne sais pas quel âge a ton identité réelle. Est-ce que Maïa a un âge ?
Maïa : numériquement, Maïa est née juste après mon burn-out, je dirais quelque part en 2014 (j’ai fait un burn-out en 2013). J’avoue qu’elle m’a dépassée ! J’avais choisi un pseudonyme histoire d’avoir un nom sur Facebook, et puis de fil en aiguille elle a pris son indépendance !
Marie : on a pas mal discuté avec Manu de la notion des générations sur la médiation numérique, de celle des communs, etc… en se disant qu’il y a eu une première génération qui l’a pensée un peu technologiquement, à l’endroit de l’état, une deuxième génération qui a commencé à l’inscrire dans les territoires dans les EPN (espaces publics numériques) avec la volonté de commencer à se rapprocher des citoyens mais aussi d’y mettre de la culture, et qu’aujourd’hui on arrive dans une troisième génération, que moi je représente un peu plus, avec les tiers-lieux, des fablabs et des liens plus fins entre société civile et état. Comment tu te situe toi par rapport à ces trois générations et quel héritage vois-tu qu’on devrait continuer à porter ou pas aujourd’hui pour avancer dans le bon sens, au-delà des déclarations publiques qui sont faites à l’heure actuelle ?
Maïa : tu as posé la question de mon âge. Ce n’est pas un secret, j’ai 44 ans, et les ordinateurs sont arrivés très tôt dans ma vie. Mon papa s’est passionné pour ça, donc j’ai eu les premiers MO5, TO7 quand j’étais gamine, et pour moi l’ordinateur fait partie de ma vie. Toutes ces étapes là je les ai vécues, je les ai traversées. Qu’est-ce qu’on doit emmener ? Qu’est-ce qu’on ne doit pas emmener ? C’est une question compliquée. Comme je le disais tout à l’heure, je suis assez ambivalente par rapport à cette notion. Moi sans ordinateur, je ne respire plus ! Je pense que tout le monde a vu passer la Pyramide de Maslow avec le wifi en bas ? Je fais partie de cette génération là. J’ai absolument besoin d’un ordinateur, connecté à internet si possible, dans ma vie. Maintenant, j’ai conscience que ça peut s’arrêter, et que donc il faut que je l’anticipe. Je me fais des sortes de défi qu’on se pose à soi-même : « Aujourd’hui, pas d’internet !« . Par exemple là, je n’ai pas emmené mon ordinateur avec moi, alors que normalement il est toujours dans mon sac à dos.
Marie : est-ce que c’est lié à une sur-connectivité ? Tu parlais tout à l’heure d’un burn out, est-ce qu’il y a un moment où tout à coup tu t’es rendue compte que tu passais de l’autre côté du miroir ?
Maïa : oui et non. C’est un outil. Sans ça, je ne serais pas ici aujourd’hui. Le numérique c’est ma porte d’entrée sur les relations sociales. Ce n’est pas que je sois quelqu’un de timide, mais j’ai quand même un fond d’anxiété, un besoin d’être seule très souvent. L’ordinateur permet d’être avec les gens sans y être tout à fait. Même si je disais qu’il faut qu’on anticipe comment ça va se passer après, je me dit qu’heureusement, pendant toute cette période, j’aurais créé un réseau réel, avec de vrais êtres humains, et il y aura toujours moyen de les recontacter autrement. Mais parce que le réseau a été créé pendant toutes ces années où j’ai été connectée grâce à l’ordinateur. En traversant les différents milieux dont j’ai parlé au tout début, j’ai gardé des contacts dans chacun de ces milieux au fur et à mesure.
Marie : du coup tu continues aussi de les imbiber de tes réflexions, tu permets une trans-disciplinarité ?
Maïa : ceux qui me suivent oui, bien sûr. Après, ce n’était pas évident comme décision à prendre de montrer toutes les facettes au même endroit. Il fallait aussi accepter que j’allais perdre des relations sociales, parce qu’on a tous un peu tendance à jouer le jeu dans tel ou tel milieu, et que forcément, si je commence à parler de la psychothérapie par exemple… La psychothérapie, il fut une période où les livres étaient cachés dans ma chambre, je ne voulais pas que les gens qui venaient chez moi les voient. C’était un sujet un peu tabou. Aujourd’hui ça m’est totalement égal. Les personnes à qui ça ne parle pas, eh bien on ne sera pas en lien, et ça ne me pose pas de soucis.
Marie : on se dit qu’on est en train de réfléchir à la fois individuellement et collectivement à des nouveaux modèles d’organisation, que les makers, comme le dit la sociologue Isabelle Berrebi-Hoffmann, sont sur des communautés ouvertes qui vont générer peut-être demain des espaces de dialogue et des écosystèmes différents. Est-ce que là-dessus il y a quelque chose que tu vois venir qui est positif et qui va peut-être nous permettre de nous organiser différemment ? Ou est-ce que tu penses que ça va rester singulier comme on a vu arriver des coopératives agricoles au début du siècle, et qu’on les a laissé de façon singulière vivre leur génération puis mourir ?
Maïa : j’ai envie de dire deux choses. La première c’est que je ne suis pas prospectiviste, et que mon parcours fait que je vis véritablement dans l’instant présent. J’observe mes contemporains, j’aime beaucoup décrire ce que je vois mais, surtout après avoir découvert la notion d’effondrement, je ne me risquerai pas à dire « ceci » ou « cela » va arriver, « nous allons vers ceci » ou « c’est mieux que cela ». Je ne sais pas. Je regarde ce qui est, je regarde où je me sens le mieux, mais je ne peux pas dire que c’est tel ou tel modèle qui va l’emporter ou qui devrait l’emporter. Je n’ai pas d’avis là-dessus. Le deuxième aspect, c’est que pour m’être un peu renseignée, notamment grâce à un reportage en plusieurs épisodes sur Arte (Ni dieu ni maître, une histoire de l’anarchisme) qui m’a profondément bouleversée, c’est que tous les mouvements auto-organisés dans l’histoire ont été réprimés extrêmement violemment. Aujourd’hui les communs, ça commence à sortir c’est un petit peu rigolo, c’est sympathique, mais (j’espère que ça n’arrivera pas) j’ai un peu peur que si véritablement ça se met à émerger, il se passe ce qui s’est passé à Notre Dame des Landes, c’est à dire à moment donné « les communs maintenant vous arrêtez, on vous a assez laissé jouer ». J’ai peur que le système réagisse assez fort. Mais là c’est pareil, je n’annonce pas que ça va arriver, c’est juste une peur personnelle.
Marie : ça questionne le dialogue qu’on avait ce matin avec Mounir Mahjoubi, secrétaire d’état au numérique, qui disait qu’il ne souhaitait pas voir le commun comme une idéologie mais que c’était quelque chose à disperser, selon lui, comme un outil, ce qui n’est pas forcément le cas de tous les makers et de tous les penseurs dans le pair-à-pair. Est-ce qu’à l’inverse tu vois toi dans les communautés aussi tout un tas de belles expériences, j’en suis convaincue. Vous avez sorti avec d’autres auteurs récemment un livre sur ce sujet (Vers une république des biens communs ?). Est-ce qu’on peut croire que le pair-à-pair puisse imbiber une partie de notre société ?
Maïa : en fait, il ne faut pas le dire trop fort, mais ils sont là depuis toujours. Simplement, je pense que c’est mieux s’ils ne cherchent pas justement à prendre le devant de la scène. En fait, les communs et le pair-à-pair sont là dans nos sociétés. Et effectivement, des tas d’expériences absolument réussies dont on n’entend jamais parler, intégrées dans le tissu associatif local, avec les institutions, ça se passe très bien, et qui ne cherchent pas à se faire connaître au-delà de l’endroit où ils sont, il y en a en France mais partout dans le monde. Alors on en entend parler soit quand ça se passe mal, que ça se durcit, et c’est le conflit qui vient sur le devant de la scène. Mais en réalité ça fait partie de nos façons de fonctionner. Il n’y a pas que l’état, il n’y a pas que les grandes personnalités qu’on voit à la télévision, il y a aussi des milliers et des milliers de personnes, tous les jours, qu’on ne connaît pas. Et moi c’est ça que j’aime documenter, ce sont ces personnes là que j’aime aller voir, faire leur portrait dans le journal, dire qu’elles existent.
Marie : c’est à dire que tu mets le commun dans un endroit tiers, qui n’est pas forcément l’endroit de l’intérêt général porté par un état régalien, pas forcément à l’endroit de l’économie puisqu’on sait aussi que le commun peut aussi trouver sa place dans l’économie, mais comme un tiers qui a toujours existé qui est culturel ?
Maïa : ma formation initiale c’est la biologie. Donc il y a peut-être un côté un peu déterministe mais je pense que les communs, comme l’entraide –et je ne suis pas la seule à le dire, Pablo Servigne a sorti un livre là-dessus (L’entraide, l’autre loi de la jungle)– ce n’est pas parce que c’est une valeur morale que c’est porté, c’est parce que c’est une nécessité vitale, biologique. Quand on est dans l’adversité, quelle qu’elle soit, à moment donné, on arrête de se taper dessus et on fait ensemble, parce qu’il faut survivre. Donc pourquoi les communs ré-émergent ? Parce qu’on a commencé à entrer dans l’effondrement, et que c’est absolument nécessaire. Que ce soit l’état ou le marché, ils sont en train de s’écrouler en fait, ce n’est même pas la peine de leur taper dessus. On voit bien que les subventions n’arrivent plus, que les mairies doivent se débrouiller seules, et que forcément, qu’est-ce qui émerge ? C’est le commun. Mais pas parce qu’il y aurait eu une poussée politique qui défendrait cette idée-là plutôt qu’une autre, parce que c’est nécessaire pour survivre. Partout où les communs émergent, c’est parce qu’il y en a besoin.
Marie : est-ce qu’il y a un rapport aux communs qui te semble particulièrement réjouissant, qui te donne l’envie à le fois de continuer, et aussi en te disant « ça c’est une idée qui m’accroche et qui va peut-être pouvoir accrocher plein d’autres gens » ?
Maïa : je dois avouer que ce qui me plaît le plus dans les communs, c’est la pratique pair-à-pair, qui donne la place à chaque individu, qui lui fait confiance, qui accueille ses élans contributifs. Parce qu’en fait, dans nos systèmes tellement hiérarchisés et bureaucrates, les élans des personnes ne sont plus jamais pris en compte nulle part. Ce que je trouve absolument merveilleux dans les endroits où je vais et où je vois se pratiquer le commun, ce sont les visages qui s’illuminent quand on demande à une personne comment elle veut contribuer. Tout le monde a envie de contribuer au monde en fait. Simplement, il faut ouvrir des espaces pour ça. Et à partir du moment où on ouvre l’espace à une personne, elle le prend. Elle va parfois mettre un petit peu de temps, ça manque de confiance, on n’y croit pas, on ne sait pas, on a peur, on s’est tellement fait taper sur les doigts depuis tout petit que ça ne se fait pas forcément comme ça du jour au lendemain. Mais quand on laisse cet espace là aux gens, ils le prennent, tous, quel que soient leur niveau d’études, leur genre, leur couleur, que sais-je. C’est profondément humain de vouloir contribuer en réalité. Mais il faut créer l’espace pour ça.
Marie : ce podcast s’appelle les NEC + Ultra, le meilleur des numériques en commun. Même si on vient à peine de commencer, est-ce qu’il y a quelque chose que tu vois qui te plaît ?
Maïa : ce n’est vraiment pas pour vous caresser dans le sens du poil, mais je trouve très important et très intéressant qu’il y ait ce Medialab, ce lieu prévu pour la documentation, qu’elle soit écrite, orale, j’espère pour le partage de tout ça derrière au plus grand nombre. Je trouve que c’est vraiment important qu’il y ait ça dans les événements pour partager ce qu’on est en train de faire ici à toutes les personnes qui ne seront pas là.